Chartres

1. Ô la folle entreprise
Du prince de Condé !
À Chartres la jolie
Il a voulu entrer ;
C’est à lui grande folie.
Il n’y entrera pas :
Les bons soldats de France
Ne le souffriront pas.

2. La ville fut sommée
Un samedi matin
De par monsieur le prince
Et l’amiral mutin ;
Ont envoyé trompettes
Et aussi le héraut ;
Sus Chartres la jolie
Ont crié à l’assaut.

3. Dites-nous, capitaines,
Si vous y tiendrez bon,
Ou si monsieur le prince
Enverra son canon
Au pied de vos murailles
Pour les faire tomber,
Ou si vous voulez rendre
Au prince de Condé.

4. Lors répondit Linière :
« Nous ne le craignons point ;
À toute heure qu’il vienne
Avons les armes au poing
Pour lui liure bataille
À lui et ses soldats.
S’il veut perdre la vie,
Sus, qu’il nous vienne voir ! »

5. Le héraut s’en retourne
Au prince de Condé :
« Or sus, or sus, trompettes,
Quelle nouvelle apportez ? »
— « En vérité, mon prince,
Nous avons eu grande peur
De voir tant de soldats
À l’environ des meurs. »

6. « Linière si vous mandez
Qu’il a les armes au poing,
Lui et toute sa bande
Et qu’il ne vous craint point,
Et, de brief, il vous défie,
Vous et tous vos soldats,
Et si voulez mourir,
Que vous l’allez donc voir. »

7. Lors répondit le Prince :
« Il les faut aller voir !
Fourbissez tous vos armes
Et aussi vos harnois.
Marchons tous en bataille,
Montrons-nous gens de bien
Tout le pillage est vôtre ;
Je n’y demande rien. »

8. Au coin de sainct Maurice
Leur canon ont campé ;
À coups d’artillerie
La ville ont salué,
Tant qu’ils y ont fait brèche
De quinze à seize pas,
Pour aider faire approche
Jusques sus les remparts.

9. Quand les soldats de Chartres
Voirent ainsi entamer
Leurs murailles et abattre,
Ils se sont présenté
Jusques dedans la brèche,
Criant tous d’une voix :
« Si voulez faire approche,
Entrez à cette fois ! »

10. Le prince de Condé
Et aussi l’amiral,
Du clocher saint Maurice,
La brèche ont découvert ;
Lors à leurs soldats crient :
« Ne vous avancez pas,
La brèche est remparée ;
Nous n’y entrerons pas. »

11. Et les dames de Chartres,
Faisant leur plein devoir.
Voyant leurs gens combattre
Chacun de son pouvoir,
Portaient des confitures
Jusques sus les remparts
Pour réjouir le cœur
À tous leurs bons soldats.

12. Qui fait ceste chanson,
Fut un brave soldat
Étant sus les murailles,
Aussi sus les remparts,
Priant Dieu par sa grâce
Qu’il leur voulut aider
Et convaincre la force
Du prince de Condé.

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